En octobre dernier, l’artiste Varieras nous offrait Variables, un EP envoûtant fort de sept morceaux. L’opus est un appel à la méditation, entre musique orchestrale et sonorités électroniques. Retour sur un coup de cœur de l’année 2020 !

La musique de Varieras semble en marge tant elle invoque des influences diverses, à la fois musicales et culturelles. Dans cet EP, nous plongeons dans un univers sonore onirique, habité par des instruments à cordes, des pianos et des synthétiseurs. Cet ensemble confère à l’opus une ambiance qui appelle au calme et à l’introspection, il nous transporte ailleurs, sur une plage, dans les nuages… avec toujours cette envie de planer envahissante.
Le compositeur a grandi dans une famille de mélomanes, c’est donc tout naturellement qu’il apprend le piano dès son plus jeune. Il s’éloignera de sa pratique orchestrale en partant faire ses études à Tokyo, où il se plongera dans un univers musical radicalement différent. De la contrainte de découvrir une approche de la musique qui ne lui était pas familière, Varieras va créer un monde qui lui est propre, aux sonorités électroniques apaisantes.
Il a quelque chose de l’ordre de la méditation dans cet EP : il nous donne envie d’être doué.e de synesthésie afin de pouvoir voir les sonorités et de s’y plonger corps et âme. La puissance de cet opus est de nous offrir un large panel d’émotions à son écoute. Ici, le mélange des sonorités classiques et électroniques fonctionne à merveille et crée une identité sonore complexe capable de nous mettre face à nous-mêmes.
La structure de Variables est finement pensée sous forme de déconstruction/construction. Organisé autour de trois ensembles, il questionne la notion de cycle temporel. Ce désir de questionner le temps s’inscrit dans une réflexion sur l’année 2020, entrecoupée de confinements et de couvre-feu. Nous retrouvons donc trois volets au sein de l’EP : "Direct Sunlight", "Radiant", et "Bakélite". L’idée de saisonnalité est au cœur de ces titres et nous embarque dans une cyclicité qui fait appel à la mémoire et aux émotions.

L’ensemble "Direct Sunlight" forme un thème, chaque morceau qui le compose est construit autour de suites d’accords qui lui est propre. Dans "Direct Sunlight II", nous entendons tour à tour un piano, des violons et un quatuor à cordes qui forment un ensemble parfaitement équilibré avec une pointe de fragilité. "Direct Sunlight" est plus sinueux et abstrait, les sonorités s’estompent petit à petit pour créer une bulle de calme. "Direct Sunlight III" est un hommage à sa vie tokyoïte, le morceau est imprégné de sons captés lors de ses balades dans la capitale nippone.
Le thème "Radiant" est également composé de trois morceaux qui se construisent en interdépendance. "Radiant III" est une combinaison de "Radiant" et "Radiant II", comme si ces deux titres avaient encore des choses à nous dire une fois fusionnés. À travers l’usage de synthétiseurs FM et ARP Odyssey et d’un piano, Varieras nous offre des mélodies qui évoquent le soleil et autres éléments de la nature.
Enfin, "Bakélite" est un cycle à lui tout seul, il s’ouvre sur une reprise de la quatrième symphonie de Beethoven et s’étend au fur et à mesure jusqu’à devenir une mélodie de tonalités et de sonorités hétéroclites. À nouveau, le morceau parvient à mélanger des sons analogiques, digitaux et orchestraux, et en ce sens, il illustre parfaitement la faculté de Varieras à brouiller avec brio les pistes entre vintage et moderne, classique et électronique.
S’il y a une certitude avec ce brillant EP, c’est que nous en ressortons apaisé.es, un vrai trésor en ces temps troublés.
Agathe Pinet