Un premier EP, une finale et une multitude de concerts. Le groupe parisien Météo Mirage commence à se faire une place sur le devant de la scène française, entre rock psychédélique et poésie romantique. Rencontre avec ceux qui feront la pluie et le beau temps de la musique de demain.

Fontainebleau, un après-midi d’automne. Les rayons du soleil percent à travers les pins et éclairent le jardin. Entre espadrilles abîmées, sneakers et sweat-shirts de marque, la scène ressemble à un cliché du Péril Jeune, dont on aurait rapatrié les personnages dans une campagne paisible. Mais pour Max, Léo, Alexis, Noé et David, les bancs du lycée ont été désertés depuis longtemps. Difficile à croire quand on les voit nous accueillir avec une tisane à la menthe et des tartines au Nutella. Chaque semaine, le quintet de Météo Mirage se retrouve chez la mère de Max, le chanteur, pour travailler sur leur second EP. À l’ombre des pins de Fontainebleau, le cadre est idéal pour jouer de la guitare et chantonner doucement. Dans la maison voisine, surplombée par un panneau « À vendre », une visite est en cours. « Ce sont des groupies » lance la mère en riant.
Du Pont Neuf au studio
Il faut dire que Météo Mirage commence à se faire une place non-négligeable sur la scène française. Après avoir terminé en finale du Prix Société Ricard Live Music en 2018, le groupe sort son premier EP, Pacifique, en mars dernier. Une odyssée sentimentale. À travers ses quatre titres, le disque suit en effet les pérégrinations aquatiques d’un personnage au coeur brisé. Du Pont Neuf à l’océan Pacifique, même les sirènes font une brève apparition au détour d’un refrain. Mais Léo, guitariste, nous avertit tout de suite : « Le deuxième sera beaucoup plus fougueux ! » Pour en avoir le coeur net, il suffit de suivre la bande jusqu’au fond du jardin, où une cabane a été transformée en un véritable petit studio. On y trouve guitares, basses et (beaucoup de) tasses vides. Au programme aujourd’hui : reprendre l’harmonie d'un nouveau morceau, dont les couplets sont encore en chantier. Alexis se poste derrière son clavier et son micro, et le travail commence. Alors roulons, roulons, roulons…

« Alors ça, c’est carton rouge direct » Cette phrase souvent répétée dans le studio signale que l’un des membres vient de faire un faux pas. Si le début de l’après-midi se déroule dans la bonne entente, une légère tension ne tarde pas à poindre. « Il y a un no man’s land à la fin. Et hormis être jolie, cette partie ne sert à rien. » lance Max, installé de façon nonchalante sur un canapé moelleux. Très vite, Léo s’oppose et justifie ce segment, qui embarque le morceau vers une partie instrumentale. Seul contre tous, Max persiste et s’énerve : « Ça raconte quoi ? C’est une rupture absolue ! » Les esprits s’échauffent, chacun campe très fermement sur sa position. Élément progressif de concert à retirer du morceau, ou bien partie instrumentale à conserver et habiter ? Pour les musiciens de Météo Mirage, la réponse est simple : une pause est nécessaire. Pour apaiser les tensions, remplissons les ventres.
L'art d'avoir toujours raison
Après quelques cigarettes et une bonne tartine, retour au studio. Cette fois-ci, ce sont David, à la basse et Noé à la batterie qui prennent les devants… Et ne s’arrêtent plus ! L’occasion pour Léo de murmurer en souriant : « Les basses-batt’… » Une énième fois, le groupe lance le morceau avec les nouveaux accords. Silence dans l’assemblée. L’extrait déroule, puis s’arrête. Max s’exclame avec un large sourire : « Et là je veux 150 violonistes ! » Tous sont satisfaits du travail accompli. Le compromis est adopté. Mais le calme plat ne dure pas longtemps. Car chez Météo Mirage, le débat est roi. Conséquence directe de la passion de Léo pour Schopenhauer, qu’il cite à toutes les occasions. Pour l’amour du débat, pour l’art d’avoir toujours raison, envers et contre tout… D’ailleurs, si on vous demande comment sera le prochain EP du groupe, sachez que Schopenhauer le trouve « super bien ».
Lolita Mang