Une pochette d’album, c’est un peu comme la couverture d’un livre : malgré le dicton, on lui fait parfois confiance aveuglément, à tort ou à raison. Qu’elles aient été réalisées par des professionnel.les de renom ou qu’elles soient DIY, les pochettes sont tout bonnement indispensables. Parmi celles-ci, il y a celles qui ne nous ont jamais déçus ; celles qui sont de véritables oeuvres d’art ET qui illustrent parfaitement l’univers musical d’un.e artiste. Alors, donner envie d’écouter des albums grâce à leurs pochettes ? On a souhaité relever le défi ! Voici la rubrique Pochettes Surprises.
Dogs for Friends, Fatboy
Après avoir remporté le tremplin étudiant TREMA 2019, puis après avoir été retenu dans le Top 100 du Prix Ricard Live Music 2020, Dogs for Friends a dévoilé son premier EP. Disponible depuis tout juste un mois, Fatboy nous plonge dans l’univers du groupe de potes angevins, un univers post-pop influencé par Bon Iver, King Krule et Motorama. Mais, celui-ci ne manque pas pour autant de personnalité ! Preuve à l’appui, avec la cover de l’opus, aussi originale que décalée.

Si, à première vue, la signification de la pochette de Fatboy semble énigmatique, voire presque insaisissable, elle est en réalité extrêmement réfléchie. C’est en effet une cover complexe, plutôt représentative de leur musique, que Charles, Massimo, Baptiste et Alexy ont choisi pour leur premier EP. Entièrement conçue et réalisée par les quatre membres du groupe, celle-ci montre un homme à la tête de chien ou “un homme en chien”, assis seul à la table de sa cuisine, face à un Tupperware vide et une bouilloire.

D’entrée de jeu, la jeune meute angevine a donc jugé juste de représenter son univers musical avec un montage “absurde”. Ce choix peut sembler de mauvais goût. Et pourtant ! Non seulement, on y retrouve un côté assez humoristique, mais, en plus, émerge de la pochette un sentiment de mélancolie particulièrement fort et prenant. Cette même mélancolie que l’on ressent en écoutant les quatre titres composant Fat Boy.
La direction artistique est donc tout simplement logique et cohérente : un espace du quotidien, une pénombre assez triste, une couleur de fond terne, un homme, seul face à lui-même. Dogs for Friends a souhaité ici rire “de la misère, qu'elle soit sociale ou sentimentale plutôt que de s'y complaire”. Si la solitude qui se dégage du personnage nous touche, la pochette dans son ensemble nous rappelle un thème récurrent dans la musique du groupe : la complexité des rapports humains.
Ne ratez surtout pas le clip de "Coldsun", réalisé par Robin Alliel.
Airsouth, Exhale
Signé sur le label parisien Kowtow Records (Monolithe noir ; Penelope Antena), Airsouth vient tout juste de sortir un nouvel EP, intitulé “Exhale”. Inspiré par des artistes comme Mura Masa, Cashmere Cat et Fakear, celui-ci nous immerge ici dans une electronic fantasy expérimentale. Si cet EP est particulièrement singulier, c’est notamment pour ses mélodies, mais c’est aussi parce que l’artiste a lui-même dessiné sa pochette. Tout comme sa musique, la cover de “Exhale” est donc une vraie “bouffée d’air frais” onirique.

Cette pochette d’EP, Airsouth l’a voulu épurée : cadre beige, fond gris-bleu, des branches de fleurs, un jeune homme. Lui seul est à même de mettre son oeuvre musicale (son EP ou ses singles) en image. Et il a d’ailleurs toujours tenu à le faire. En effet, Airsouth est un artiste aux multiples talents : il a pratiqué l'art plastique et le dessin avant même de se mettre à la musique.
Si la pochette colle aussi bien avec le reste, c’est parce que l’artiste crée ses artworks comme il crée sa musique : en diversifiant les médiums. Dessiné à la main, puis vectorisé et colorisé sur Photoshop, le résultat final nous rappelle ses sept titres. On y retrouve notamment “leurs élégances, leurs couleurs et leur tendance aléatoire”.

D’ailleurs, si l’on devait qualifier l’oeuvre globale d’Airsouth, on dirait que celle-ci est grisante. Cette pochette, c’est l’illustration parfaite d’une musique qui tient, entre autres, son inspiration de la narration de musique de films d’animation japonais. À elles deux, elles retranscrivent parfaitement les “grandes scènes surréalistes” et nous projettent droit dans l’imaginaire de l’artiste. Alors, on se sent un peu comme dans un agréable rêve.
Le magnifique clip de “Glowy (ft. Jumo)”, réalisé par Chine Thybaud et Quentin Keriven, est également à découvrir. À retrouver dans le prochain #PlanClip.
Blu Samu, ctrl-alt-del
Après la sortie de l’EP “Moka” en juin 2018, suivi d’un Colors Show hypnotique pour le titre “Clumsy Queen” en février dernier, Blu Samu a dévoilé un nouvel EP, sur lequel Yseult a d'ailleurs travaillé. Avec ctrl-alt-del, cette perle de la scène hip-hop belge dévoile une facette beaucoup plus sombre de son personnage. La pochette en est le parfait exemple !

Capturée par le photographe Rayan Nohra Errechidi du premier coup, la pochette de ctrl-alt-del fait en sorte que l’on soit encore plus fan de l’identité visuelle de Blu Samu. Si celle-ci semble un peu trash, cela ne nous déplaît pas pour autant. Au contraire, cet aspect contribue à la rendre bien plus intense, bien plus puissante. Blu Samu y apparaît nue, recroquevillée sur elle-même, avec pour seuls accessoires deux ailes en cuir noir et d’énormes bottes. Ainsi, cela rend vraisemblablement compte de l’intention de l’artiste avec cet EP : se mettre à nu, en montrant une certaine exubérance, ainsi que ses côtés les plus obscurs.
Si cette pochette ressemble à une véritable oeuvre d’art, cela n’a rien d’étonnant. En effet, c’est Cécile Di Giovanni, une plasticienne basée à Paris, qui s’est chargée de la direction artistique de la cover (également derrière Noir d’Yseult). L’artiste, connue pour ses mises en scène brutales et violentes, aime visiblement mettre les corps en scène, et va parfois jusqu’à les mettre en danger, symboliquement. Ici, Di Giovanni semble avoir aidé Blu Samu à dépasser ses peurs et à transformer sa vulnérabilité en une force. Pour nous aussi, ça a un effet cathartique !
Ne manquez pas l'incroyable clip de "GFM", réalisé par Maky Margaridis et Louis Lekien.
Par Laura Gervois.