Joanna, Enchantée Julia, et maintenant Jäde. La triade d'artistes a des points communs : un projet sorti en 2020 (ok fin 2019 pour Enchantée Julia), un nom de scène étant un prénom féminin commençant par J, un métissage ... et pourtant les comparaisons s'arrêteront là. Ne vous détrompez pas, le projet de Jäde est unique et atypique. Entre pop et trap, la chanteuse propose un néo-R'n'B hybride dans son EP "Première Fois", où elle flirte intelligemment avec les codes de chaque style sur des productions travaillées et prometteuses. Pierre précieuse à suivre !

Hello Jäde ! Tu as commencé à te faire connaître sur Soundcloud, où tu postais des morceaux tels que “dés.ordre”, “lundi,mardi”, "miel"… Peux-tu nous raconter comment tu t’es lancée ?
Salut ! Ma passion pour la musique arrive assez jeune, j’ai toujours aimé chanter et écrire depuis que j’ai plus ou moins 12 ans. Je me suis installée à Paris à dix-neuf ans et j'ai rencontré quelques beatmakers qui vont me pousser à partager mes morceaux sur internet. J’ai posté ma première chanson sur Soundcloud en 2016. Petit à petit, j’ai commencé à avoir quelques retours sur cette plateforme, ce qui m’a motivé à continuer.
Pourquoi avoir choisi le nom d’artiste Jäde ? C’est un joli prénom et c’est le nom d’une pierre précieuse assez mystérieuse, qui est symbole d’amour et de protection.
Première Fois rassemble 7 titres, parlant de relations entre homme et femme, de la séduction à une rupture en passant par le désir et surfant sur des clichés de masculinité et de féminité (“Milano”, “Longtemps”). Comment sont nés ces titres ? Est-ce que tu les avais depuis quelques années ou sont-ils plutôt récents ? Voulais-tu faire passer un message dans cet EP ?
Ces chansons datent toutes de 2019, ce n’est pas si vieux. Ça a pris plus de temps pour les sortir que pour les construire. Je n’ai pas essayé d’avoir un discours engagé derrière tout ça ni de faire passer un message. J’avais juste envie de raconter ma vie. Je parle à un garçon dans mes chansons, c’est très personnel.
En tant que jeune femme en France, je parle d’amour et de sexe, forcément ça soulève des thèmes comme le féminisme par exemple, mais ce n’est même pas fait exprès. Pour moi, il n’y a rien de bien fou dans ce que je raconte : le stress avant un rendez-vous, le plaisir avec un homme, la déception… Ce sont des choses de la vie. Les rappeurs aussi parlent de ces sujets (les femmes, le sexe) depuis la nuit des temps, et même souvent de façon vulgaire mais personne ne leur parle “d’érotisme”. C’est devenu banal pour les hommes de parler de ça mais peut-être pas encore pour les femmes.
Sur cet EP, tu t’es entourée des producteurs Schumi1, mais aussi de Negroide, Kofi Bae et ZAK, ainsi que de NKF, connu pour ses productions pour Angèle, Damso et quelques artistes du rap français. Comment les as-tu rencontré et comment avez-vous travaillé ?
Je connais Schumi1 depuis longtemps. Il y a une bonne alchimie musicale entre nous, c’est un ami. J’aime construire avec lui la production, voire même participer en tant que co-productrice. Mais sur ce projet, j’ai plutôt assisté en donnant mon avis pendant les sessions. Pour les autres producteurs comme Kofi Bae ou Negroid, je reçois d’abord la production du morceau, j’écris, je pose et puis on se revoit en studio pour retravailler les morceau ensembles. Quant à NKF, c’est mon label qui l'a contacté. On lui a envoyé un premier titre, “Longtemps”, auquel il a tout de suite accroché. Il a finalement mixer tout l’EP ! J’étais super contente car que je connaissais déjà très bien son travail.
Dans “Lundi, mardi” tu chantais “Lundi c’est pop, mardi c’est trap”, quelque chose qu’on ressent beaucoup dans cet EP entre “Les vêtements” un titre plus pop, et “Longtemps”, “La Flute enchantée” ou encore “Milano” plus trap - d’où te vient l’envie de mélanger à la fois des textes romantiques et des drops bien sentis ?
J’ai commencé à découvrir les productions traps en 2017 avec des artistes comme Gouap. J’ai tout de suite adhéré au délire minimaliste, presque trop facile, trop sale… Il y a quelque chose de tranché dans les intrus : on ne passe pas par quatre chemins, on va droit au but, un peu comme dans mes textes. Ça m’a parlé.
Et d’ailleurs, quelles sont tes influences ?
J’ai énormément d'influences musicales. Mon père m’a bercé dans la chanson française : il écoutait Barbara, Mathieu Chedid, Camille... Au lycée j’écoutais tout ce qui se faisait en terme de new R'n'B comme The Weeknd, FKA twigs, Banks, Doja Cat… Puis quand j’ai commencé à sortir des sons sur Soundcloud, il y a eu un mouvement un peu “rap underground” avec des artistes lyonnais comme Lala&Ace ou Jorrdee, c’est une vibe qui m’a inspirée.
Tu viens de signer chez Entreprise (Sony). Qu’est-ce que ça a changé pour toi ? Ça me permet d’aller plus loin dans mes idées. Je me penche beaucoup plus sur les morceaux, en studio, avec les producteurs, avec mon équipe etc.. Il y’a un vrai cadre de travail donc le résultat est plus qualitatif.
Côté concert, tu as joué au festival Solidays en 2019 sur la petite scène du tremplin Radar pour les artistes émergents. C’était comment ?
C’était très intimidant ! Même si mes textes ne le sont pas forcément, je suis une fille plutôt timide… La scène, surtout lors de gros festivals, m’a permis d’en apprendre plus sur moi et de gagner en confiance. J’en garde un super souvenir !
Timide ? Pourtant tes textes, ta manière de chanter et ton identité visuelle prêtent à t’imaginer en femme fatale ! Je ne pense pas être une femme fatale. En vérité, mes chansons finissent souvent mal pour moi quand on écoute bien ! [Rires]. Pour moi une femme fatale c’est une femme très séduisante, mais pas forcément une bimbo hyper sexualisée. C’est juste une femme avec un charme naturel comme Marion Cotillard.
Ecouter "Première Fois" :
Propos recueillis par Prisci Adam