À mi-chemin entre Liverpool et le Havre, White Velvet compose "Adulthood" (2019, melmax music), un premier EP enchanteur teinté d'une douce mélancolie. Nous la retrouvons quelques heures avant son concert du 23 octobre au Supersonic pour parler d'amour, du temps qui passe et de la chanson française.

Bonjour Juliette ! Comme beaucoup de filles, tu rêves d’être chanteuse alors que tu écoutes Björk et Jenifer dans ta chambre d’enfant. Comment Juliette Richards est-elle devenue White Velvet ?
J’ai commencé à écrire des chansons avec ce groupe que j’ai monté avec deux amies, sans avoir de connaissances en anglais ou de la guitare. J’ai toujours appris en faisant les choses. Au cours de mon parcours j’ai pu expérimenter différents genres musicaux jusqu’à ce que j’arrive à une couleur sonore qui me ressemble vraiment avec White Velvet.
Tu peux nous parler des influences qui ont forgé ton identité musicale ?
Le tout premier groupe que j’ai monté était folk rock. Après ça j’ai eu un groupe de rock psyché où j’étais chanteuse et tambouriniste. Puis j’ai eu un projet en duo guitare/voix très folk. J’aime beaucoup les musiques épurées où la voix joue un rôle central. C’est ce que je mets en avant en premier puis je trouve plein de choses autour.
En septembre, tu sors « Adulthood », un format six-titres. Tu peux nous raconter les émotions qui ont accompagné la composition et la parution de cet EP ?
Ça s’est fait en deux étapes car on a enregistré trois titres l’année dernière ("Winter", "Don’t Trust the Tide", "Maybe if I Died") dont deux qu’on avait déjà sortis clipés, puis trois autres cette année ("Fine", "Adult Hood", "Morning Swim"). C’est quelque chose qui se ressent à l’écoute de l’EP où l’on retrouve des couleurs très différentes. Ce n’est pas les mêmes émotions qui ont guidé ces deux phases de composition et surtout, elles ont été composées dans la durée. Pour les trois premiers, je les avais composé bien avant, et sur les trois autres, il y en a deux que j’ai composés deux semaines avant d’aller en studio. J’étais inspirée, pour être honnête je venais de me faire larguée et ça marche très bien avec moi (rires).
La musique devient un exutoire…
Oui c’est hyper important pour moi. J’ai beaucoup de chansons d’amour, ce n’est pas très original mais c’est l’un de mes sujets de prédilection. Dans « Adulthood », je parle aussi beaucoup du temps qui passe et du passage à l’âge adulte. Ma vie privée et mes émotions sont inséparables de ma musique, cet EP est très introspectif.
Tu as dit que, quand tu as commencé la musique, chanter en anglais n’était pas évident et pourtant ton phrasé est très harmonieux…
J’ai commencé très jeune à écouter beaucoup de musiques anglaises. Je savais que c’est comme ça que je voulais chanter et j’ai appris par imitation. J’écoute plus de musique française aujourd’hui mais ça n’a jamais été évident pour moi. Il y a des artistes qui touchent à des styles qui me parlent plus aujourd’hui comme Flavien Berger.
En 2017, la ville du Havre te propose de choisir une ville pour partir en résidence artistique et tu vas à Liverpool pendant un mois. Pourquoi ce choix ?
C’était surtout parce que j’avais envie de creuser les liens que j’avais avec l’Angleterre. J’avais vécu à Leeds en Erasmus. Avec mon premier groupe, on avait fait une tournée en Combi Volkswagen de Brighton à Liverpool, donc je connaissais déjà la ville. Je garde un super souvenir de notre date au festival Soundcity.
Dans une interview radio, tu expliquais que tu t’inspires toujours de ton environnement pour composer…
L’idée de la résidence à Liverpool, c’était d’enregistrer des sons de la ville et des sons du Havre pour composer. Ce qui me plaisait, c’était d’intégrer des éléments sonores des lieux où j’écrivais mes chansons. Quand je suis allée en studio, on a gardé l’idée en utilisant cette fois des sons de la maison où j’ai enregistré. C’est une maison de famille où j’ai des souvenirs d’enfance liés aux objets et aux images. Ça avait du sens de me réapproprier cet environnement pour l’intégrer dans ma musique. Par exemple, on a utilisé une casserole, un verre à vin, une cloche… il y a aussi des chants d’oiseaux dans une musique parce qu’on les entendait depuis la grange où on a enregistré les voix.

Ton show varie beaucoup d’une date à l’autre ?
Je m’adapte aux situations, en fonction du budget, du lieu et de la configuration technique. Je me suis toujours dit qu’il fallait que je puisse jouer toute seule pour être indépendante. J’adore orchestrer des shows avec des musiciens mais ce n’est pas toujours possible. J’ai fait un live au MuMa (Le Havre) avec saxo, baryton, ténor, clavier, basse, batterie, violoncelle et violon.
Tes chansons contiennent des éléments électroniques qui dénotent par rapport à tes premières influences rock et folk. Est-ce que tu as envie d’approfondir l’exploration de ces palettes sonores ou bien y a-t-il d’autres genres que tu souhaites incorporer à ta musique à l’avenir ?
Je ne veux pas rentrer dans la catégorie « électro ». C’est surtout le producteur musical (Gaëtan Le Calvez, batteur du groupe Nuit) qui intègre ces éléments-là. Moi, je gère plutôt les arrangements au saxophone dans certaines chansons. Tous ces sons viennent des enregistrements effectués dans la maison, c’est des casseroles, des visses etc. Ce que j’aime avec la présence de ces touches électro, c’est justement qu’on ne les identifie pas comme un élément central de la chanson.
Propos recueillis par Jules de Saint-Michel