Chez Tourtoisie, on aime autant danser dans les salles de concert que s’asseoir au fond d’un siège moelleux devant un écran géant. En prêtant toujours une oreille attentive au contenu audio des films, une fière équipe de frondeurs est heureuse de vous présenter B.O.BINES, la branche cinématographique de Tourtoisie. Cinéma indépendant, bandes originales renversantes, compositeurs émergents… C’est avec grand plaisir que chaque semaine, nous vous partageons nos coups de cœurs musicaux du grand ... et du petit écran .
C'est la rentrée aussi pour B.O.BINES, la branche ciné de Tourtoisie. On revient sur les films et les B.O qui nous ont marqués cet été : films plus discrets ou œuvres attendues, quels ont été nos coups de coeur de l'été ?
#1 - Fragile de Emma Benestan - B.O de Julie Roué

Des vacances à Sète entre le soleil, les parcs à huitres, la danse. Ajoutez à ça une histoire d’amour et des copains et vous avez votre film de l’été. Mais là où les comédies de l’été nous fatiguent de leurs clichés et leur lourdeur, Fragile renverse les a priori : c’est bien le garçon qui pleure la fille et qui se gave de chocolats devant des soap, après que la fille lui ait brisé le coeur. Az a un but : reconquérir Jess et un moyen, la faire retomber sous son charme en apprenant à danser grâce à sa meilleure amie Lila.
Le film, imparfait et un rien prévisible, dégage surtout une énergie de dingue, aussi bien par ses comédiens beaux et maladroits quand ils apprennent à danser sur les rochers qui surplombent la Méditerranée que par le soleil omniprésent qui fait transpirer les corps bronzés. Une énergie soulignée par la danse et la musique contagieuses. La musique originale est signée Julie Roué, dont les compostions électroniques croisent des musiques préexistantes contemporaines aux fortes inspirations traditionnelles orientales, qui rappellent la culture algérienne d’Az par touches. Un film sucré et doux comme les cornes de gazelle que prépare Az à Lila.
La B.O dont on ne se lasse pas :
Acid Arab - "La Hafla" : du groupe franco-oriental, champions dans la fusion entre électro et musique orientale. Une musique rythmée et vivante puissamment menée par une voix masculine qui chante en arabe.
Julie Roué – "Flamingoes" : de l’electro retro sur lequel on a envie de danser toute la nuit, tout simplement.
Emma de Bouchony
#2 - Annette de Leos Carax - B.O des Sparks

Difficile de passer à côté du dernier film de Carax, quelques images mystérieusement dévoilées bien des mois avant sa sortie cet été, sans pour autant nous laisser la possibilité de comprendre tout à fait le sujet. C’est l’effet Carax et son film Annette ne rompt pas le charme, bien au contraire. Anne et Henry, stars hollywoodiennes dans leur domaine, passionnément amoureux accouchent d’une petite fille un peu étrange au don extraordinaire.
Annette est une comédie musicale grandiose par sa mise en scène théâtrale à souhait, où le décor devient partie intégrante de l’image. Le film propose avant tout une atmosphère dramatique et sombre, presque glaçante. Une atmosphère dont la musique remarquable, composée par le groupe de rock légendaire Les Sparks, participe à l’ampleur. Musicalement, on retrouve bien sûr les lignes rocks signatures du groupe, mais également du chant lyrique, de l'orchestre… On flotte pendant 2h20 dans un autre univers, celui si particulier de Carax dont l’imagination et l’aboutissement de 10 ans de travail, valent bien le ticket de cinéma.
La B.O dont on ne se lasse pas :
The Sparks – "We Love Each Other So Much" - la voix aiguë et angélique de Marion Cotillard en duo avec celle beaucoup plus grave d’Adam Driver. Une musique très émouvante par son contraste, et dont la pate rock de Sparks accélère le rythme à mesure de la passion du couple.
The Sparks – "All the Girls" – un rythme toujours rock sur lequel chante la voix nonchalante d’Adam Driver. Brumeux et maudit.
Emma de Bouchony
#3 - Benedetta de Paul Verhoven - B.O d'Anne Dudley

Benedetta était sans doute l'un des films les plus attendus du Festival de Cannes cette année, sa sortie ayant été décalée de plus d'un an à cause de la pandémie. Virginie Efira y interprète Sœur Benedetta, jeune religieuse entrée volontairement au couvent dès son plus jeune âge dans l'Italie du 17ème siècle. Depuis toujours, elle semble entretenir une relation privilégiée avec les voies divines. Tout bascule lorsqu'une nouvelle femme est admise dans la communauté des sœurs, la jeune et rebelle Bartolomea, remettant en cause sa foi et sa pureté.
Benedetta montre d'abord l'hypocrisie et l'opportunisme de l'Eglise, prête à croire aux miracles s'ils apportent du prestige à leur institution. La nonne est au début considérée comme une quasi-sainte, en proie aux visions mystiques et même capable de ressusciter. Le film comporte également un volet beaucoup plus sulfureux, détaillant la relation charnelle entretenue en secret par Bartolomea et Benedetta. Le cinéaste hollandais propose dans sa mise en scène un mélange des genres frôlant parfois le kitsch, voire le cinéma Bis, qui en font une œuvre singulière, originale et ambigüe où de multiples questions restent en suspens...
La B.O dont on ne se lasse pas :
La bande originale est signée Anne Dudley, qui avait déjà collaboré avec Verhoeven pour Elle et Black Book. Elle livre une partition classique qui comporte des chœurs d'église mais aussi un orchestre massif. Elle s'éloigne de l'aspect kitsch et souvent très second degré du film pour revenir vers une ambiance plus religieuse et fidèle à l'époque de l'action.
Lucie Blanc-Jouvan
#4 - Drive my Car de Ryusuke Hamaguchi - B.O d'Eiko Ishibashi

Prix du scénario à Cannes, Drive my car est un film japonais qui retrace la rencontre entre un metteur en scène et sa chauffeuse, qui le conduit tous les jours vers le théâtre où il monte Oncle Vania d'Anton Tchekov. Un homme brisé mais digne, que l'on sait rongé par le deuil et la culpabilité. Ce déchirement intérieur reste silencieux et accompagné par une mise en scène sobre, parsemée par de magnifiques moments de grâce.
Drive my car est un film qui s'inscrit dans la durée (3h environ) mais qui ne comporte aucun superflu. La longueur y est nécessaire pour amorcer le rapprochement des personnages avec une douceur et une légère mélancolie. Sans que l'on s'en aperçoive, les deux êtres évoluent sous nos yeux et réparent leurs blessures en construisant une relation de plus en plus intime.
La B.O dont on ne se lasse pas :
Composée par Eiko Ishibashi, artiste musicienne, compositrice et multiinstrumentiste, elle signe ici une musique à l'image de la mise en scène, gracieuse et épurée.
Lucie Blanc-Jouvan